Vous êtes adeptes d’Uber Eats, Bolt, Deliveroo, Lyft, etc. ? Mauvaise nouvelle pour les consommateurs : les tarifs de ces services de livraison à domicile pourraient très prochainement exploser en raison du vote d’une nouvelle directive européenne sur le statut de ces travailleurs !
Livraison à domicile : vous payerez bientôt beaucoup plus cher (mais c’est pour la bonne cause)
Livraison à domicile : l'UE protège (enfin) les travailleurs
Les tarifs des services de livraison à domicile pourraient bientôt exploser. Et j’ai envie de dire, ce serait leur rendre la monnaie de leur pièce, car, de nombreuses enquêtes l’ont démontré, Uber, Deliveroo, et toutes ces plateformes, comme on les appelle... se sont largement assises sur le droit du travail pour s’imposer... au grand dam des chauffeurs de taxi notamment... Ce qui change pour ces plateformes, c’est le vote définitif hier d’une directive européenne qui requalifie les travailleurs indépendants en salariés.
Concrètement, le livreur qui vous a apporté votre pizza ou vos sushis hier était certainement un auto-entrepreneur. Avantage pour les plateformes : comme les charges sont réduites, et même nulles la première année, on peut les payer au lance-pierre !!! 2 ou 3 euros pour livrer une pizza, pour faire des kilomètres en vélo ou en scooter et monter au 5e étage, ce n’est pas raisonnable. Autre avantage encore plus énorme pour ces plateformes : comme il s’agit de prestataires et non de salariés, au premier problème, hop, on le débranche, et le livreur n’a plus de boulot du jour au lendemain. Même chose pour les chauffeurs de VTC : sauf qu’eux, en plus, ils s’endettent pour prendre une voiture en leasing... Quand une plateforme les éjecte, ils perdent 30 ou 50 % de leurs revenus ou plus encore, et c’est la spirale infernale et très rapidement, la faillite.
Vers une obligation du statut de salarié ?
Très curieusement, la France, qui est souvent très à la pointe en matière de transposition des directives européennes, est bien embêtée. Le gouvernement français a même voté contre la directive européenne en conseil des ministres européens, avant que le projet de directive n’arrive au Parlement !
Finalement passée, cette directive, qui va devoir être transposée en droit français, va permettre à des centaines de milliers de vrais-faux indépendants de demander à être considérés comme des salariés ! Et ce, même si la directive n’est pas encore transposée, puisque le droit européen est supérieur au droit national. La raison est très simple à comprendre : le statut d’auto-entrepreneur, le nouveau nom des auto-entrepreneurs, est assez unique en Europe... Et il est clairement dans le viseur de Bruxelles car il n’est pas assez protecteur, on peut même dire qu’il n’est pas du tout protecteur. Mais il a un gros avantage : ce statut permet de maintenir dans l’emploi, parfois artificiellement, des vrais faux travailleurs indépendants, qui sortent ainsi des statistiques du chômage. Fini les petites cachoteries...
Les plateformes grincent des dents
L'autre avantage de cette directive européenne, est qu'elle a pour but de limiter le nombre auto-entrepreneurs bidon. Bidon n'est peut-être pas le meilleur terme à employer, quoique... Entendez pas là les milliers d'auto-entrepreneurs qui ne sont pas en règle ni avec l'URSSAF, ni avec le fisc. Et l'on peut dire qu'ils sont nombreux. Il y a quelques années, en effet, dans une enquête très fouillée du Point, nos confrères avaient révélé qu'en Seine-Saint-Denis, 350 000 auto-entrepreneurs sortent tous les jours pour travailler essentiellement à Paris, mais bizarrement, le taux de recouvrement des charges sociales des auto-entrepreneurs était très médiocre, voire même le plus bas de France. !
Nos confrères avaient interviewé un haut fonctionnaire qui, sous couvert d’anonymat. Celui-ci expliquait que l’URSSAF et les impôts laissaient faire sur instruction des préfets et donc, du gouvernement... Mais pourquoi donc ? Pour acheter la paix sociale en fermant les yeux sur du vrai faux travail au noir, mais aussi pour sortir opportunément des chômeurs des statistiques... Pour remédier à cela, depuis le 1ᵉʳ janvier de 2024, les plateformes ont l'obligation de payer les cotisations sociales à la place des auto-entrepreneurs, mais bien évidemment, cela n'empêche pas qu'il y ait des contournements du système... Quoi qu'il en soit, les sommes en jeu avec cette directive européenne sont énormes ! Pour des entreprises comme Uber et Deliveroo et toutes les autres plateformes du même acabit, cette nouvelle directive européenne se chiffre en dizaines et dizaines de millions d’euros... et pour certaines, c’est peut-être même la clé sous la porte qui les menace. Les chauffeurs de taxi, eux, en revanche, se frottent les mains s’ils nous écoutent ce matin !
Quelques chiffres :
- Il y a 5,5 Millions de faux “travailleurs indépendants” en Europe sur un total de 30 millions (source : Commission européenne)
- 750 000 "auto-entreprises" créées en France en 2024 (prévision)
- 2,7 millions d’auto entreprises (juillet 2023, source, INSEE)