La France n’était pas en règle : la directive européenne sur les congés payés et leur cumul durant les arrêts maladies des salariés n’avait pas été transposée en France, malgré l’obligation. La Cour de cassation, en septembre 2023, a tranché en faveur des salariés. Mais les patrons, eux, ne voient pas la chose d’un bon œil… et surtout ne veulent pas se plier à la loi. La CPME a donc lancé une pétition pour demander… le retrait de la mesure.
Congés payés en arrêt maladie : pour les patrons c’est « non »
Congés payés cumulés durant les arrêts maladie : la CPME s'Insurge
La Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) a lancé le 30 octobre 2023 une pétition, exprimant une opposition ferme à une décision de la Cour de cassation. Cette décision, alignant le droit français sur le droit européen avec un retard de 20 ans, permet désormais aux salariés d'accumuler des congés payés même pendant les arrêts maladie.
La CPME, dans son communiqué de presse, déclare : « Sur le fond, découpler travail effectif et congés payés est profondément choquant. C’est la valeur travail qui est ainsi attaquée. » « De surcroît, il est parfaitement injuste qu’un salarié absent pendant une longue période bénéficie d’autant de congés qu’un salarié présent à son poste », estiment les patrons… qui doivent payer ces congés.
La crainte de milliards d’euros de surcoût pour les entreprises
Représentant un large éventail de 243.000 entreprises, la CPME se positionne comme un défenseur acharné des intérêts des PME.
Elle considère que la nouvelle mesure « risque de coûter plusieurs milliards d’euros chaque année aux entreprises françaises, grandes ou petites, et de condamner certaines PME ». La mise en conformité du droit français avec le droit européen représenterait un coût d’environ 3 milliards d’euros par an à l’ensemble des entreprises en France, selon les premières estimations.
Les salariés peuvent récupérer les congés non-acquis
Mais ce coût pourrait être plus important : la mesure est rétroactive. Les salariés qui, durant les dernières années, ont été en arrêt maladie sans cumuler de congés payés pourraient réclamer ces congés ou le paiement de ceux-ci. Un coût supplémentaire qui inquiète la CPME. « La rétroactivité qui permettra aux salariés de se retourner contre leur employeur et de réclamer des congés payés au titre de leurs arrêts-maladies des trois dernières années est inadmissible. »
« Les entreprises devront-elles payer 5 semaines de congés à un salarié absent de l’entreprise depuis 1 an ? 15 semaines s’il est absent pendant 3 ans ? », demande la CPME dans sa pétition.
Congés payés et arrêts maladie : la CPME demande au gouvernement d’agir
Pour les patrons, notamment ceux des PME, cette décision représente un fardeau financier potentiellement élevé. La CPME met en garde : « Cette décision (...) est donc totalement inacceptable. Les choses ne peuvent rester en l’état. » Par sa pétition, le syndicat espère donc changer la situation, revenir en arrière, et contraindre l’exécutif à prendre des mesures.
En revanche, pour les salariés, cette mesure leur rend des droits que la France leur a retiré pendant 20 ans. C’est en 2003, en effet, que la directive européenne avait été adoptée « avec l’aval du gouvernement français », souligne la CPME dans sa pétition. La mesure pourrait être vue comme une avancée significative dans la reconnaissance de leurs droits et de leur bien-être. Et surtout pourrait leur permettre de mieux vivre leur arrêt maladie et ne pas être tentés par faire du présentéisme.
Quel futur pour les congés payés durant les arrêts maladie ?
La CPME pourrait-elle faire changer les choses et retirer, aux salariés français, un nouveau droit à peine acquis ? Difficile. Les directives européennes s’imposent aux gouvernements des Etats-membres de l’Union européenne. Le gouvernement français ne peut que les transposer dans le droit français, et se fait régulièrement épingler pour ne pas avoir respecté cette obligation.
Malgré ses plus de 200.000 adhérents, la CPME n’a donc que très peu de chances de faire changer les choses. Les salariés concernés, soit ceux qui ont été en arrêt maladie et qui n’ont pas cumulé de congés payés durant cette période à hauteur de 2,5 jours par mois, peuvent d’ores-et-déjà préparer leur demande auprès de leur entreprise ou des entreprises dans lesquelles ils ont travaillé depuis 2020 : la rétroactivité de l’acquisition des congés payés pendant les arrêts maladies pourrait leur rapporter quelques centaines d’euros, s’ils ont été privés de ce droit.