Voici que mars s’achève et nous laissons derrière nous la Journée Internationale des Droits des Femmes, date où tous s’empressent de faire un point de situation, mais ce n’est pas une raison pour abandonner la cause. En effet, aux timides avancées répondent souvent des reculs majeurs.
Et si ce printemps était celui des femmes ?
La question de la liberté : un panorama des droits des femmes en demi-teinte
En Iran, le mouvement Femme-Vie-Liberté a secoué le pays à la suite de l’assassinat d’une jeune fille. Révélateur d’un désir de liberté, les femmes et les hommes le soutenant sont, au mieux, menacés, souvent condamnés, voire exécutés.
La guerre aux portes de l’Europe a réveillé les fantômes de la traite des blanches, et par ce biais, la question de la marchandisation des corps féminins, quel qu’ils soient, réduits à la prostitution et à la pornographie.
A l’échelle nationale, la lutte pour les droits des femmes érigée en grande cause a donné naissance à un plan national avec 46 mesures phares/ Cependant malgré les efforts pour lutter contre les violences conjugales et protéger les femmes en situation de précarité, 28 féminicides ont déjà été recensés en 2023. Le faible nombre de condamnations prononcés montre le travail fastidieux qu’il reste à abattre, notamment en termes de culture : c’est peut-être avec Sartre et la difficile articulation entre amour et liberté1, que nous pouvons penser et dépasser les ressorts de ce qui fut nommé « le crime passionnel »
L’égalité salariale un enjeu d’actualité
D’un point de vue plus pragmatique, la réforme des retraites a remis sur le devant de la scène la question de l’inégalité salariale, des temps partiels, des trimestres de maternité et donc…l’inégalité de retraites2 – et l’effort à fournir. Bien sûr il y a en soi l’inégalités de salaire à poste égal avec un homme, mais la nature des emplois et des activités non rémunérées que font les femmes expliquent pour beaucoup leur désavantage financier : surreprésentées dans les métiers du soin,3 essentiels, mal payés et aux horaires difficiles et incomplets, elles sont également celles qui prennent majoritairement la charge des enfants et des malades, réduisant leur temps d’emploi, sans parler de leur implication en associations.
Tous ces éléments mis à bout sont autant de facteurs explicatifs des inégalités financières entre hommes et femmes, d’une plus grande précarité chez ces dernières, notamment lorsqu’elles sont mères célibataires. Mais ils ne doivent pas être considérés comme naturels et nécessaires, nous pourrions envisager une plus grande reconnaissance de la contribution des femmes à la société aussi bien financièrement que symboliquement, et pourquoi pas en termes de trimestres cotisés !
Malgré de timides avancées comme la loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle quoi imposait un quota de 40% de femmes aux postes de direction des grandes entreprises ou la mise en place d’indexes d’égalité, les faits ne suivent pas encore : ledit quota n’est pas respecté et la création de l’index professionnel d’égalité femme homme s’avère être un outil utile mais insuffisant pour mener à l’égalité salariale. Or, relisons le passé, l’égalité financière n’est-elle pas la clé de la liberté effective des femmes ?
Un changement en bien des mentalités ?
La liste des obstacles supplémentaires qu’ont à franchir les femmes est encore longue. Néanmoins, des percées sont visibles, notamment chez les plus jeunes. Ainsi, lors de notre matinale #4, Maxime Ruszniewski, CEO de Remixt, partage des résultats encourageants : la jeune génération (notamment les hommes) est résolument engagée à lutter contre les violences faites aux femmes et également contre tout autre type de discrimination. La solidarité entre femmes prend de l’ampleur avec le développement de clubs de réflexion féminins et le mentorat féminin en entreprise.
Aussi si Antonio Guterres, Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies depuis 2017, a déploré le dernier lundi 6 mars, que "l'égalité" entre les femmes et les hommes dans le monde aurait lieu au mieux "dans 300 ans", prouvons lui le contraire !
Comment ? En accroissant tout dispositif de reconnaissance financière et symbolique du travail féminin, en encourageant la sororité et la collaboration des hommes et des femmes, en étant à la fois fermes dans nos décisions de justice et pédagogues envers celles et ceux qui sont loin. Par un dialogue permanent entre les associations et les institutions, par une éducation émancipatrice et la présence de rôles modèles, nous pourrons, ensemble, créer un environnement pacifié où chacun a sa place, en sécurité, et disposera des mêmes chances pour réussir. Peut-être même avant 100 ans ?
1 Jean-Paul Sartre, L’Etre et le Néant (1943), Gallimard