Mondialisation et progression des inégalités de revenus

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Par Bertrand Blancheton Publié le 11 mai 2018 à 5h02
Enfant Pauvre
@shutter - © Economie Matin
0,29L'indice Gini s'établit à 0,29 pour la France.

Les études convergent pour mettre en avant une progression des inégalités de revenus depuis le seuil des années 1980. Le livre Le Capital au XXIe siècle qui étudie les inégalités à une échelle internationale a eu un retentissement planétaire. Sur la base d’un très gros travail empirique, Piketty montre l’envolée des inégalités de revenus depuis les années 1980 surtout ceux du dernier centile (le 1 % dont les revenus sont les plus élevés).

Les inégalités observées aujourd’hui sont comparables aux niveaux d’inégalités d’avant la première guerre mondiale. Le graphique ci-dessous fait ressortir une nette tendance à la hausse des inégalités de revenus depuis le milieu des années 1980 pour les pays de l’OCDE. Pour les États-Unis, la valeur de l’indice de Gini est passée de 0,34 en 1985 à 0,394 en 2014. La moyenne des pays de l’OCDE est passée de 0,29 à 0,318 sur la même période. Pour l’Allemagne l’indice est passé de 0,25 à 0,292. En Suède, les inégalités semblent bondir durant les années 2000. Par contre, au Royaume-Uni et en France l’indice est plus stable passant de respectivement 0,32 à 0,358 et de 0,30 à 0,294.

Depuis les années 1980, la globalisation financière a eu pour corolaire la stabilité des prix. Une inflation basse garantie le rendement réel des capitaux. Les revenus du capital ont progressé plus vite que les revenus du travail. Thomas Piketty a théorisé cette dynamique. Sa thèse centrale repose sur une « loi fondamentale du capitalisme » : r>g, où « r » est le taux de rendement du capital (intérêts, dividendes, royalties, loyers, plus-values financières et mobilières…) et « g » la croissance économique, dont dépend la progression des revenus du travail. Au cours de la mondialisation contemporaine les revenus des placements croissent plus vite que les salaires. Il est plus facile d’épargner pour le capitaliste afin de faire grossir son patrimoine que pour le travailleur qui doit s’en constituer un.

Pour les États-Unis, Ph. Aghion a mis au jour un lien de causalité entre les innovations et les inégalités dites extrêmes, incarnées par les très hauts revenus (dernier centile, top 1 %). Les revenus de l’innovation, et pas seulement ceux de la rente foncière ou de la spéculation, contribuent à la poussée des revenus des très hauts talents. Ceci doit déboucher sur une fiscalisation adaptée aux sources de revenus afin de ne pas freiner l’innovation.

Dans les pays émergents et en développement l’augmentation des inégalités s’explique d’abord par le fait que les revenus des classes moyennes supérieures ont rejoint ceux des classes supérieures, comme en Chine et en Afrique du Sud.

Le graphique ci-dessous met en perspective le niveau d’inégalité dans seize pays. Les inégalités de revenus sont fortes dans des pays émergents comme le Brésil et la Chine, beaucoup plus faibles dans des pays européens notamment du Nord (Norvège, Finlande, Pays-Bas, Allemagne). Aux États-Unis l’indice de Gini atteint 0,394, soit un niveau relativement élevé.

Ceci est un extrait du livre « Grandes questions d'économie du XXIe siècle » écrit par Bertrand Blancheton paru aux Éditions Ellipses (ISBN-10 : 2340024005, ISBN-13 : 978-2340024007). Prix : 22,50 euros.

Reproduit ici grâce à l'aimable autorisation de l'auteur et des Édition Ellipses.

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Bertrand Blancheton est doyen de la faculté d'économie, gestion et AES, économiste et auteur de « Grandes questions d'économie du XXIe siècle » (Éditions Ellipses, 2018).