L’euro remonte sur le ring

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Par Jim Rickards Publié le 8 juin 2015 à 5h00
Euro Valeur Dollar Monnaie Depreciation
@shutter - © Economie Matin
1,11 dollarL'euro vaut actuellement 1,11 dollar.

Si l’euro chute face au dollar, ce n’est pas parce que la Zone euro s’effondre : c’est à cause des guerres des devises. Le monde est frappé de ces maux identiques que sont un endettement excessif et une croissance insuffisante.

Le problème de croissance peut se résoudre grâce à des changements structurels… qui n’ont pas eu lieu jusqu’à présent. Le problème d’endettement peut se résoudre grâce à l’inflation, mais cette dernière est difficile à créer dans un monde en faible croissance. L’un des moyens permettant d’obtenir de l’inflation, c’est d’aller la dérober aux autres en dépréciant sa propre monnaie. Cette dynamique est le moteur des guerres des devises. Le problème, avec les guerres des devises, c’est que tout le monde ne peut pas dévaluer sa monnaie immédiatement. Les pays doivent "attendre leur tour", et dévaluer les uns par rapport aux autres. En 2011, c’était au tour des Etats-Unis de déprécier leur monnaie.

C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai considéré que l’euro était fort à l’époque, malgré les horribles gros titres de la presse européenne. Si le dollar est faible, l’euro doit être fort. Il n’y a pas d’autre issue possible. En 2012, ce fut au tour du Japon de déprécier sa monnaie. C’était la principale "flèche" des mesures dites Abenomics. Fin 2014, l’économie européenne était en difficulté, et ce fut au tour de l’Europe de déprécier sa monnaie. C’est pourquoi l’euro a baissé de 1,40 $ à 1,05 $. Ce sont les banques centrales qui organisent, en coulisse, les tournées de dépréciation d’une économie à l’autre, pour soutenir la croissance mondiale.

Mais les banques centrales ont commis une erreur de calcul majeure dans cette stratégie de guerre des devises mondiale : elles ont surestimé la croissance américaine. La Réserve fédérale et le FMI ont intégré dans leurs prévisions une croissance américaine beaucoup plus forte que celle qui s’est réellement produite. L’idée à l’origine de cette phase dollar fort/euro faible de la guerre des devises, c’était que les Etats-Unis pouvaient réellement se permettre d’avoir un dollar fort. Il s’est avéré que ce n’était pas le cas et, qu’au contraire, l’économie américaine fait une chute abyssale depuis le mois de novembre.

Les principales économies du monde s’apparentent à un groupe de soldats assoiffés ne disposant que d’une seule gourde remplie d’eau. Ils doivent se passer la gourde afin que chacun puisse en boire une gorgée lorsque c’est son tour. L’euro a pu profiter de son tour mais, à présent, il doit repasser la gourde aux Etats-Unis. Si la croissance est en panne aux Etats-Unis, le monde entier est en difficulté : le FMI et le G20 le savent bien. Comme les cours croisés représentent un jeu à somme nulle, nous savons ce que cela signifie pour l’euro. Si le dollar s’affaiblit, l’euro doit se renforcer.

Cette partie de l’analyse est fondamentale, mais mon système IMPACT a relevé un autre argument technique qui va dans le sens de la hausse de l’euro. Tant de traders se sont concentrés sur les nouvelles européennes concernant la Grèce et le chimérique "Grexit" qu’ils ont oublié de s’intéresser à l’incidence qu’une faible croissance américaine pourrait avoir sur le cours croisé.

Ils ont préféré se précipiter sur une position visant à shorter l’euro (donc à spéculer à la baisse), comme le montre le graphique CFTC, ci-dessous, qui retrace les positions spéculatives sur les contrats à terme en euro. Tout ce qui se situe au-dessous de zéro signifie que les traders qui spéculent ont une position nette short (courte). Comme vous le constaterez, le rapport montre que la position nette short est proche des extrêmes sur six ans.

En cas de rally de l’euro, les short vont perdre de l’argent. A mesure que les pertes augmenteront, ils devront acheter des euros pour fermer leurs positions perdantes, ce qui accentuera la pression à la hausse sur l’euro et aggravera les pertes des short. Cela auto-alimentera et accélèrera le mouvement de hausse de l’euro face au dollar. Notre prévision à court terme, c’est un rally de l’euro qui devrait placer ce dernier dans la fourchette des 1,20 $ au cours des semaines à venir. Au-delà, le taux de change dépendra des perspectives de croissance aux Etats-Unis.

Tant que la Fed évoquera un relèvement des taux d’intérêt américains, l’économie continuera de s’affaiblir et l’euro devrait augmenter fortement, tandis que, dans cette guerre des devises, les Etats-Unis joueront la carte du dollar faible afin de soutenir la croissance.

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Jim Rickards est rédacteur en chef d’Intelligence Stratégique et d’Alerte guerre des devises

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